Le parc national de Timna est un parc national du Néguev en Israël, dans une vallée en forme de fer-à-cheval d'une superficie de 60 km², situé à 25 km au nord d'Eilat, au bord de la route 90. La vallée est traversée par l'Israel National Trail (en), le sentier de randonnée qui court d'un bout à l'autre du pays.et pour un peu d'histoire autrefois dans cette régionEn 1934, l’archéologue américain Nelson Glueck surnomma « Colline des esclaves » le promontoire situé au centre de la plus ancienne mine de cuivre connue au monde, celle de la Vallée de Timna, au cœur de la plaine de l’Arava en Israël. Le monticule semblait en effet présenter tous les signes d’un camp d’esclaves de l’âge de fer : rudes conditions du désert, présence de fourneaux ardents et d’une barrière massive empêchant la fuite. Cependant, de nouveaux vestiges découverts par les archéologues de l’Université de Tel-Aviv renversent ce narratif et présentent une image beaucoup plus complexe de la production du métal à l’âge de fer.
Dans le cadre des fouilles archéologiques menées dans la Vallée de Timna par le Département d’Archéologie et des cultures du Proche-Orient de l’Université de Tel-Aviv, les Dr. Erez Ben-Yosef et Lidar Sapir-Chen ont analysé des restes de nourriture consommée par des fondeurs de cuivre il y a 3000 ans. Les résultats de cette analyse, publiés dans la revue Antiquity, indiquent que les travailleurs qui faisaient fonctionner les fours étaient en fait des artisans qualifiés et adulés qui jouissaient d’un statut social élevé. D’après les chercheurs, cette découverte pourrait avoir des ramifications sur des sites similaires dans la région.
«Cette découverte représente une tendance générale concernant les travailleurs du métal dans l’Antiquité», explique le Dr Ben-Yosef. «Ils avaient un rôle très spécial dans la société, et nous pouvons le démontrer en observant le site de Timna ».
Selon le Dr Sapir-Hen, spécialiste des premières sociétés complexes, les restes de nourriture reflètent la stratification sociale des différents ouvriers sur le site. “En étudiant les restes alimentaires, nous avons découvert un accès différencié à la viande qui peut indiquer différents niveaux de spécialisation parmi les travailleurs sur le même site. Cela nous permet de reconstituer la diversité sociale sur le site,” explique-t-elle.
Les rares conditions d’aridité de la vallée de Timna ont permis une conservation sans précédent de matières organiques habituellement détruites avec le temps, comme des particules d’ossements, de graines, de fruits, et même de tissus remontant au 10ème siècle avant JC. Utilisant une technique dite de «tamisage humide», les archéologues ont retrouvé sur le site de minuscules fragments d’os et d’arêtes de poisson, témoignant de la richesse de l’alimentation et de sa variété. « Les fondeurs de cuivre recevaient les meilleurs morceaux de viande et aliments» explique le Dr. Sapir-Hen, «y compris du poisson, qui devait venir de la Méditerranée à des centaines de kilomètres. Ce n’était pas un régime d’esclaves, mais d’artisans très respectés, et peut-être même vénérés ».
Le cuivre, utilisé à l’époque pour produire des outils et des armes, était la ressource la plus précieuse des sociétés anciennes. Selon le Dr. Ben-Yosef, les fondeurs devaient être versés dans l’art des métaux et maitriser les technologies sophistiquées nécessaires pour transformer la pierre en cuivre utilisable. Cette connaissance était si avancée pour l’époque qu’il est possible qu’elle ait été considérée comme magique ou surnaturelle. “Comme le pétrole aujourd’hui, le cuivre était une grande source de puissance”, explique-t-il. “Il n’est pas surprenant qu’une personne qui possédait le savoir exceptionnel de ‘fabriquer du cuivre’ ait été bien traitée. En comparant nos résultats aux rapports ethnographiques provenant d’Afrique, on s’aperçoit que les anciens fondeurs de cuivre étaient généralement vénérés et qu’on les honorait même au moyen de sacrifices d’animaux.”
La production de cuivre est une opération complexe dont chaque étape exige un niveau d’expertise différent. Il est probable que les ouvriers des mines antiques de Timna aient effectivement été des esclaves ou des prisonniers, car ils réalisaient une tâche simple dans des conditions sévères. Toutefois, l’acte de fusion, de transformation de la pierre en métal, exigeait de grandes qualités et compétences. Le fondeur devait construire un four en argile aux dimensions précises, fournir la bonne quantité d’oxygène et de charbon de bois, maintenir la chaleur à 1200 degrés, raccorder des tuyaux à soufflet, souffler une quantité d’air invariable, et ajouter un mélange de minéraux en quantité exacte. Il devait donc gérer quelque 30 à 40 variables afin de produire les fameux lingots de cuivre.
La muraille dont on a retrouvé les restes sur le site, autrefois considérée comme un rempart utilisé pour retenir les esclaves prisonniers, a apparemment joué un rôle différent. «Nous savons à présent qu’elle servait à protéger une technologie sophistiquée, le processus complexe de la fusion du cuivre et son produit le plus précieux, le lingot” dit le Dr Ben-Yosef.
Les études sur les anciennes sociétés vivant à Timna se poursuivent dans le cadre du projet de fouilles archéologiques de la Vallée centrale de Timna (CTV) de l’Université de Tel-Aviv.