Le château de Trécesson : Entouré des eaux de son étang, ce château construit en schiste rougeâtre à la fin du XIVe siècle, a conservé son aspect médiéval. Un important châtelet flanqué de tourelles en encorbellement en commande l'entrée. Le château est privé et n'est pas visitable
Mentionnant le château de Trécesson, les anciens guides n'étaient guère prolixes. De quelque couleur qu'ils étaient, ils se bornaient à indiquer que Trécesson se trouve à trois kilomètres de Campénéac, aux confins de l'Ille-et-Vilaine et du Morbihan. On voulait bien parfois nous préciser que l'édifice date du XV° siècle et qu'il est entouré d'un étang.
La réalité -si l'on peut ici utiliser ce mot- c'est que le château semble sortir d'une légende celtique. Par beau temps ses tourelles se reflètent dans le miroir parfait d'une onde immobile. Mais quand le brouillard glisse doucement sur les landes environnantes, la vaste bâtisse revêt une allure irréelle qui évoque tous les sortilèges de la grande forêt voisine: Brocéliande.
Aucun château de Bretagne ne parait mieux convenir à un fantôme. Mais celui de Trécesson est une Dame. Et, pour être précis, une Dame Blanche, comme il s'en trouve un certain nombre en cette région de Haute Bretagne. Encore convient-il de dire que cette Dame Blanche ne hante pas le château lui-même, mais ces environs immédiats. L'histoire qui suit nous apportera quelques éléments d'explication.
Il y a longtemps déjà de cela, à une époque qu'on situe vers le début du XVIII° siècle, un braconnier de la région était en train de poser ses collets dans les landes avoisinant le château, lorsqu'il entendit dans la nuit, le bruit d'un chariot tiré par des cheveux. Il se plaqua contre le sol et vit bientôt, illuminé par les rayons de la pleine lune, non pas un chariot, mais un carrosse tiré par cinq chevaux noirs. Le lourd véhicule dépassa de quelques mètres la porte d'entrée du château et s'immobilisa.
Plusieurs jeunes gens vêtus de manteaux sombres et coiffés de chapeaux à grandes plumes, en descendirent. Chacun d'entre eux portait une pelle et une pioche. Suivait une jeune fille, enveloppée d'une grande cape sous laquelle on pouvait reconnaître une robe blanche de mariée. Son pas, lent et résigné, trahissait une très grande lassitude.
Arrivés au milieu d'une prairie en contrebas, les jeunes gens se mirent à creuser une fosse profonde; puis ils firent basculer la jeune fille qu'ils recouvrirent immédiatement de terre. Longtemps, ils s'appliquèrent à tasser l'emplacement de la fosse pour supprimer toute trace de leur forfait; ils ramassèrent leurs outils et regagnèrent le carrosse devant l'entrée du château.
Le braconnier n'avait toujours pas bougé. Il vit le véhicule démarrer et reprendre la route de Campénéac. Dès le lendemain à l'aube, il se présenta au château et insista pour être reçu immédiatement par le Seigneur, ce qui lui fut accordé. Il rapporta alors fidèlement la scène dont il avait été le témoin durant la nuit. Et son interlocuteur, d'abord sceptique, finit par être convaincu de l'authenticité des faits.
Accompagné de quelques valets, le châtelain se rendit à l'endroit indiqué et fit creuser le sol. Lorsque enfin on aperçut une forme humaine, la malheureuse jeune fille vivait encore. Elle se redressa même, mais retomba aussitôt: elle était morte...
On ne sut jamais qui était la jeune épousée ainsi enterrée vive près du château de Trécesson. Mais certains laissèrent entendre qu'il s'agissait d'une fille noble de la région et que ses meurtriers étaient ses propres frères, furieux d'un mariage contracté contre leur gré.
Voilà pourquoi, depuis deux siècles au moins, on voit régulièrement apparaître aux abords du château de Trécesson, une Dame Blanche