Hôpital de Saint-Martin : la plainte de l’anesthésiste classée sans suite, le directeur évoque une « manipulation »
Les faits remontent au dimanche 24 juin, dans une salle de bloc du centre hospitalier de Saint-Martin, aux Antilles françaises. En début de soirée, une querelle éclate entre le Dr Xavier Ledoux, médecin anesthésiste-réanimateur et Roland Toussaint, directeur de l’établissement. Le lendemain, le praticien hospitalier porte plainte contre son patron, au motif de « violences [...] subies sur [s]on lieu de travail ». Contacté par « le Quotidien » à l’occasion d’un premier article, Roland Toussaint n’avait pas souhaité s’exprimer pour « laisser la justice faire son travail ».
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. La plainte déposée par le Dr Ledoux a été classée sans suite, « faute de témoins et d’éléments objectifs », explique Jacques Louvier, vice-procureur de Basse-Terre (Guadeloupe), à l’origine de la décision. Et Roland Toussaint souhaite désormais exposer sa version des faits. Il évoque une « manipulation préméditée » de la part du Dr Ledoux et « réfute toute accusation laissant entendre un comportement inadéquat ou même violent » à l’encontre du médecin.
« Je ne l’ai pas touché »
Dans sa plainte, le Dr Ledoux explique « avoir été agressé […] au bloc, en pleine zone stérile ». « Il [le directeur] est rentré sans se protéger et m’a frappé au visage à deux reprises », a témoigné l’anesthésiste, par ailleurs président d’un syndicat hospitalier local (affilié à l’INPH). Une version des faits que conteste Roland Toussaint : « Je ne l’ai pas touché. Ce soir-là, le Dr Ledoux et moi avons bien eu un échange verbal vif pendant une minute, une minute trente, mais à un mètre de distance, sans aucun contact physique. » Le directeur reconnaît par contre que l’altercation a bien eu lieu en « zone stérile, dans le couloir d’entrée du bloc ».
Un conflit qui remonte à plusieurs mois
Selon Roland Toussaint, cette altercation est le fruit d’un « stratagème » monté par le Dr Ledoux. La dégradation des relations entre les deux hommes a pour origine la politique de réduction des dépenses et de restructuration menée par l’hôpital. Le directeur a ainsi entrepris ces derniers mois de diminuer le nombre d’heures supplémentaires ou d’encadrer davantage les évacutations sanitaires. Roland Toussaint en est persuadé : « Le Dr Ledoux a cette obsession, cette volonté délibérée de me faire renvoyer depuis mon arrivée à la tête de l’hôpital, en septembre 2011. (...) Pour être moins douloureuses, toutes les propositions de restructuration ont pourtant été étalées sur un plan de trois ans », nuance Roland Toussaint, qui estime que « 95 % des praticiens sont prêts à accepter ces décisions ».
L’affaire devrait rebondir dans les prochaines semaines. L’agence régionale de santé (ARS) de Guadeloupe a auditionné le 27 juin Roland Toussaint ainsi que le président et le vice-président de la Commission médicale d’établissement (CME). Actuellement en congés, le directeur sera de retour à son poste le 23 juillet. De son côté, le Dr Ledoux ne baisse pas les bras. « Nous attendons de recevoir l’avis de classement sans suite pour déposer une plainte avec constitution de partie civile au Tribunal de grande instance de Basse-Terre », explique Me Ioana André, avocate de l’anesthésiste. Qui, en parallèle, a aussi demandé l’ouverture d’une enquête administrative auprès de l’ARS.
› ANNE BAYLE-INIGUEZ
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